LE 405 OU LA MÊME LUNE EN MÊME TEMPS
sept
23
2021
LE 405 OU LA MÊME LUNE EN MÊME TEMPS
mozaik
Séparation

par Patrick Richard

Je revenais d’un voyage en Gaspésie avec les miennes. Nous avions loué une caravane qui boit de l’essence comme d’autres boivent de la bière un samedi après-midi de canicule. Pendant mon périple autour de la bienheureuse péninsule, bercé par le vacarme de notre maison roulante conduite par celle qui partage ma vie, j’ai pianoté sur l’écran de mon portable et observé du mouvement sur la terre du 405 : mouvement de planches, de roues et de gens s’affairant à construire un contenant en vue d’y offrir du contenu. De loin, vu de Paspébiac, disons, tout cela semblait un peu surréel, comme une idée sortie d’une tête et qui se matérialise illico. De jour en jour, un nouveau parc émergeait dans ma ville, un parc au bord de l’eau peuplé de saules pleureurs. Intrigant.

En stationnant notre maison roulante louée devant notre maison fixée achetée, je me suis aussitôt précipité au 405, caméra à la main, afin d’être là pour l’ouverture officielle. En arrivant sur les lieux, j’ai constaté promptement que tout cela n’était pas un leurre des réseaux sociaux. Les photos de Christian Gonzalez disaient vrai : nous étions dans un parc qui en temps de le dire (et en temps de voyage bringuebalant en Gaspésie) s’était métamorphosé en lieu de fête, de jeux, de paix et surtout, de rassemblement. Dans les jours qui ont suivi, j’y suis retourné pour goûter toutes les sauces et chaque fois, je gardai des yeux contemplatifs et pensai à la conjoncture exceptionnelle de ce parc invitant et du besoin des citoyens de se rassembler après des mois de confinement. Comme si le gars des vues, pour une fois, avait arrangé tout ça, la pandémie, la solitude, le besoin de se retrouver, puis un parc pour chanter jouer, danser, manger, crier.

Des événements comme ceux-là – une proposition toute neuve répondant à un besoin pressant – n’arrivent pas souvent. Certes, on pourrait simplement dire « C’est juste un parc! Y’a pas de quoi s’énerver le poil des bras! ». Mon poil de bras s’est redressé quelques fois cet été. Je suis du type qui apprécie les gens souriants, heureux et rassemblés et c’est exactement ce que Le 405 a offert cet été. Au-delà des artistes exceptionnels qui s’y sont produits, des ateliers retrouvés avec nos artistes, des séances de yoga, des pièces de théâtre ou de toutes ces activités culturelles bienvenues, c’est avant tout le besoin d’être ensemble et de se dire enfin « Salut, comment ça va? » avec un ciel au-dessus de nos têtes ou une même lune à regarder. On reste vigilant, on ne se saute pas encore dans les bras en s’embrassant à pleine bouche, mais pendant de courts instants, on a pu goûter à nouveau à cette liberté que nous prenions trop souvent pour acquise.

Impossible de ne pas aimer la Gaspésie. Impossible non plus de ne pas apprécier ce que Le 405 a offert cet été. À moins d’être un éternel insatisfait de la vie qui a perdu ses yeux d’enfant dans un détour trop brusque de la 132. On se retrouve avant le prochain équinoxe.

Séparation

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