Un café, cinq questions : Marie-Belle Ouellet
mars
01
2020
Un café, cinq questions : Marie-Belle Ouellet
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Un café, cinq questions est un lieu de discussion où je prends le temps d’un café pour questionner un artiste de Vaudreuil-Dorion, un citoyen, une femme d’affaires ou un barbu circonspect, sur son rapport à la culture à l’aide de cinq questions pas du tout scientifiques en lien avec l’actualité, avec la vie, avec notre place dans l’univers et surtout, avec rien de tout ça. À la dernière gorgée de café, je demande à mon invité de choisir mon prochain invité.

Aujourd’hui, à la demande de Jean- Noël Bilodeau, je bois un café avec Marie-Belle Ouellet, autrice, poète et amoureuse des lettres esseulées.

Qui est-elle?

Quand elle était enfant, Marie-Belle Ouellet a reçu en cadeau de sa grand-mère le livre Anne… la maison aux pignons verts. À compter de ce jour, une conviction s’est installée tout près de son jeune cœur d’enfant : éveiller les autres par les mots. Si les nombreux livres qu’elle a lus lui ont fait du bien, l’écriture lui a offert un refuge, une liberté et un espace sans pareil. De concours d’écriture en concours, sa confiance s’est forgée jusqu’à ce qu’elle complète sa formation en littérature à l’université. Aujourd’hui, elle a à son actif trois recueils de poésie, dont un inspiré d’une résidence passée à la Maison Félix-Leclerc en 2011, et vient tout juste de déposer son manuscrit chez son éditeur. Entre ces mots inspirés, elle s’arrête, le temps de se déposer et de réfléchir à nos cinq questions posées.

Quel est le grand leg culturel que vous aimeriez laisser?

« J’aimerais que les gens découvrent la poésie d’une autre façon et qu’elle soit accessible aussi pour tous. Que ces gens-là voient qu’avec la poésie, on peut créer des univers irréels, mais qui font du bien et qui nous permettent de sortir de la souffrance. La poésie, c’est aussi être en connexion avec soi-même, se reconnecter avec ce qui est essentiel pour nous et refleurir après avec tous ces mots-là qui nous font du bien. Les mots peuvent servir à ça, comme si c’était un baume sur notre cœur, un baume sur des instants difficiles ou même de beaux instants. On peut se créer son espace pour suspendre un peu le temps dans la vie effrénée qu’on a tous les jours et juste respirer, admirer ces paysages inventés qu’on a créés avec des mots. Comme on regarde des photographies artistiques, là, on regarde des poèmes, on peut les voir, les sentir, les toucher, les goûter. C’est une question d’éveiller les sens. Tout est possible en poésie. Dans la vie, on est limité, mais quand on arrive dans le poème, il n’y a plus de limites. Tu peux aller partout, ça permet de voyager à l’intérieur de toi, de voyager ailleurs aussi. »

Si vous aviez à définir la poésie à un martien qui comprend le français, mais qui ne sait pas ce qu’est la poésie, que lui diriez-vous?

En guise de réponse, Marie-Belle invite le lecteur à aller revisiter la réponse précédente. Autrement, la poète y va d’un intéressant souvenir : « J’avais déjà entendu à la radio un scientifique qui s’était fait demander par l’animateur : si les extraterrestres existaient et qu’on devait leur expliquer qu’on était sur terre et ce qu’on faisait, qui irait parler pour nous? Le scientifique avait répondu :  eh bien, un poète!  La poésie, c’est comme des paysages et un voyage sans fin. Elle est beaucoup plus forte que ce qu’on pense et les gens ne sont pas au courant. Pour aider les gens (et ultimement les martiens!) à découvrir ce que c’est, je les invite au Festival de poésie à Trois-Rivières, où les poètes lisent eux-mêmes leur poème dans différentes langues. C’est un festival incontournable, qui se tient pendant deux semaines vers la fin septembre, début octobre. J’y ai été invitée à quelques reprises et j’y suis même allée pour le plaisir. C’est vraiment magique, on fait de belles découvertes et c’est là qu’on voit le type de poésie qui vient nous toucher. Je veux qu’on s’enlève l’image du poète fou, du poète qui écrit juste pour lui, beaucoup de gens ont cette image-là. »

Un artiste qui vous inspire et pourquoi?

« Michel Pleau. Un poète. C’est mon mentor. Quand j’étudiais en littérature, j’ai profité d’un programme de parrainage et j’ai été jumelée avec lui. C’est très pratique quand tu commences dans le domaine! Il a gagné dernièrement le Prix du Gouverneur général et a aussi été poète au parlement. Il m’a vraiment guidée. Il était à l’écoute de ce qui m’habitait, il me posait des questions pour m’amener à réfléchir sur ce que je voulais faire sentir. C’est un artiste que j’admire aussi pour ce qu’il a écrit, toujours dans la simplicité, dans l’humilité, la fragilité, la sensibilité, c’est tout doux. C’est de la poésie qui est très accessible pour les gens en général. C’est une belle porte d’entrée vers l’univers poétique au Québec. C’est un grand poète et c’est un bon ami! »

Une citation, une chanson et un livre sur une île déserte

Citation : « Vint un temps où le risque de rester à l’étroit dans un bourgeon était plus douloureux que le risque d’éclore. » Anaïs Nin (1903-1977), écrivaine.
« Elle a eu un parcours et une vie pas simple du tout, mais c’est un beau modèle de femme, elle est particulière, hors norme. »

Chanson : « La Gaspésie, de Félix Leclerc » (parce que c’est Félix…)

Livre : « Venir au monde, de Margaret Mazzantini. Ça m’a marqué, j’étais enceinte de mon 2e enfant, je savais ce que c’était que de donner la vie, ça m’est arrivé juste au bon moment dans la vie et ça m’a révélé toutes sortes de trucs. Sinon, il y a aussi, L’ombre du vent de Carlos Ruiz Zafon… magnifiquement bien écrit. Mais je voulais choisir une femme! »

Si le temps s’arrêtait et que vous aviez tous les talents, sur quoi travailleriez-vous?

« Sur la poésie! Je me concentrerais juste sur ça. Pour moi, la poésie est comme de l’art visuel, c’est un peu la même chose. Les mots sont visuels, ils servent à créer des images, des visages, des photographies, c’est tout ça qu’on peut faire avec les mots. Juste être tout simplement à travers l’écriture est quelque chose de puissant pour moi et de grandiose. C’est une façon de vivre aussi, une façon de se reconnecter avec soi, de se ressourcer.

Au terme de cette autre rencontre inspirante, Marie-Belle Ouellet m’invite à mon prochain tête-à-tête en compagnie d’Isabelle Turcotte.

Patrick Richard

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