LA LÉGENDE DU FORT DE L’ÎLE AUX TOURTES
mai
17
2023
LA LÉGENDE DU FORT DE L’ÎLE AUX TOURTES
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Par Robert Payant

L’occupation de l’île aux Tourtes, selon un texte datant de 1725, fait mention d’un fort, d’une église, d’un presbytère, d’un corps de garde et d’une maison de pièces sur pièces avec 40 arpents de désert servant à la nation Népissingue. Il n’en fallut pas plus pour commencer à effectuer des recherches plus approfondies. Un groupe de citoyens fonde au début des années 90, la Société archéologique et historique de l’île aux Tourtes (SAHIT).

À la suite de l’acquisition de la Seigneurie de Vaudreuil par Philippe de Rigaud de Vaudreuil, le 12 octobre 1702, l’île aux Tourtes aura servi à accommoder un groupe de Népissingues, à évangéliser les Amérindiens et à faire le lucratif commerce des fourrures.

Selon les recherches réalisées pour le compte de la Société archéologique et historique de l’île aux tourtes, non seulement son occupation par les groupes autochtones remonte bien avant l’arrivée des Européens en Nouvelle-France, mais aura servi de lieu de rencontre aux embarcations de passage afin de faire une pause et de s’approvisionner en tourtes, en poisson ou en gibier.

Dans cette continuité, le nouveau Seigneur de Vaudreuil avait compris l’importance d’établir un certain contrôle sur les communications fluviales en effectuant une halte au fort de l’île aux Tourtes. Les premiers résidents de l’île seront amenés par la mission du fort établi par le sulpicien, l’abbé René Charles de Breslay. Cette mission prendra forme entre 1704 et 1727 sous la recommandation du nouveau gouverneur Vaudreuil.

Environ 200 membres de la nation népissingue semblent avoir vécu à ce moment sur l’île aux Tourtes, soit quelque 25 à 50 huttes ou petits campements érigés en périphérie du fort, ce même groupement que les Algonquins qualifiaient de sorciers à cause de leurs redoutables chamans.

Durant cette période se trame le contrôle des ressources. La volonté d’évangélisation servira de prétexte pour superviser le flot des fourrures venant des pays plus hauts.

Effectivement, selon un écrit publié par la Société historique de Montréal, François d’Youville vend de l’eau-de-vie aux Amérindiens, et ce, à l’encontre des règlements. Sous ses ordres, il fait intercepter les flottilles de canots et les force à traiter à son comptoir du fort de l’île plutôt qu’à Montréal.  Bénéficiant de la protection du gouverneur, ce fermier François d’Youville s’occupera d’éduquer les sauvages à sa façon. Il troquera, avec l’aide d’une garnison militaire, les fourrures par la distribution d’eau-de-vie. Il aime l’argent et plus encore, les plaisirs que l’argent achète. Montréal s’en ressentira. Tout le monde s’en plaint. Le gouverneur ne le nie pas, mais, prétend-il, rien ne s’y oppose. Depuis quelques années, d’Youville réside au fort de l’île, entre les mois de mai et octobre de chaque année pour prendre la charge du comptoir de traite tout comme le faisait son père avant lui.

La mort du gouverneur en 1725 marquera la fin de ses abus. La carrière de d’Youville s’arrêtera subitement en 1730, avec sa mort prématurée à l’âge de 30 ans. Le commerce de la fourrure perdra de son importance de même que sa raison d’exister. La mission de Saint-Louis du haut de l’île sera déplacée vers la mission d’Oka.

En terminant ce trop court document, mentionnons que la colonisation de l’île aux tourtes marquera les débuts de l’établissement français dans la presqu’île de Vaudreuil-Soulanges et deviendra le véritable berceau du développement de notre région.

Photo : Le fort de l’île aux Tourtes sur la gauche et le fort de Senneville à droite permettait de contrôler le passage de la rivière des Outaouais en direction du bassin fluvial (Source : Désiré Girouard, Lake St-Louis, Old and New, 1893)

Sources : Documents de la Société archéologique et historique de l’île aux Tourtes et de la Société historique de Montréal, Albertine Ferland Angers, 1977.

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